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Libres pensées d'un mathématicien ordinaire Posts

Comment publier vertueusement ?

RNBMCe petit billet d’information et d’aide à la décision, à destination des mathématiciens, a été préparé par et pour le réseau national des bibliothèques de mathématiques (RNBM).

  1. Pourquoi chercher à publier vertueusement puisqu’il y a Sci-Hub ? D’une part Sci-Hub est illégal, et d’autre part Sci-Hub s’appuie par construction sur les abonnements des établissements académiques à travers le monde. Sci-Hub libère la science d’hier et d’aujourd’hui par une mutualisation pirate, ce qui peut avoir un bon effet systémique à terme. En attendant, une bonne manière de libérer sa propre production scientifique immédiatement, durablement, et légalement est de la déposer dans des dépôts ad hoc comme arXiv, dont le miroir français est intégré à HAL.
  2. Est-il suffisant de déposer systématiquement sur arXiv ? Le dépôt sur arXiv est toujours bienvenu pour la diffusion ouverte de la science. Mais comme rien ne garantit que la version finale qui a bénéficié du processus éditorial de la revue est sur arXiv, les lecteurs vont souvent préférer la version publiée par la revue lorsqu’elle est accessible. De ce point de vue, la situation idéale est celle des revues en libre accès qui déposent elles-mêmes sur arXiv, ou qui s’appuient sur arXiv comme les épirevues de www.episciences.org par exemple. D’autre part, un certain nombre de revues pratiquent le libre accès pour les auteurs et les lecteurs (libre accès « diamant ») sans passer par arXiv.
  3. Pourquoi ne pas tout faire sur ResearchGate ? ResearchGate est une plateforme semi-fermée de même nature que Facebook, qui n’est pas portée par des institutions académiques, et qui a vocation un jour à monétiser son accès, ses services, et sa base de données. Elle n’aide pas vraiment la science ouverte, bien au contraire.
  4. Quelles sont les revues les plus vertueuses ? Les revues en libre accès à la fois pour les auteurs et les lecteurs, soutenues par une institution académique, et adossées à arXiv, font en général partie des plus vertueuses, bien que certaines fassent appel, pour la gestion éditoriale et la mise aux normes, au bénévolat des chercheurs. À l’opposé, les revues à accès payant ne sont pas toutes à mettre dans le même sac : certaines pratiquent des prix raisonnables, qu’elles soient à but lucratif ou pas. De manière générale, le fonctionnement éditorial d’une revue a un coût, et les différences se font sur le modèle et la politique de financement, d’accès, et de diffusion. Concrètement, pour un chercheur junior qui souhaite publier un article, il est possible d’établir une liste de revues envisageables sur des critères scientifiques, puis de trier cette liste en tenant compte du modèle de chaque revue par rapport à la science ouverte. Un chercheur sénior peut se permettre de viser d’emblée les revues les plus vertueuses sur le plan de la science ouverte, au détriment de leur prestige scientifique, car cela est moins impactant sur son devenir. Et ils peuvent tous déposer leur version finale sur arXiv si la revue ne le fait pas.
  5. Pourquoi il n’est pas vertueux de payer l’éditeur pour libérer l’article à la publication ? C’est le système des APC, pour article processing charges. Comme tout a un coût, l’idée de faire payer l’auteur à l’éditeur pour diffuser librement son article peut séduire. Mais ce paiment de l’auteur ne sera accessible qu’aux auteurs riches ou membres d’institutions riches, et les articles publiés par les moins riches resterons moins diffusés et surtout accessibles uniquement sur abonnement, ce qui fait au bout du compte payer deux fois les institutions académiques. Le modèle du subscribe to open (S2O), qui se développe en ce moment, est de ce point de vue plus vertueux, car il ne fait payer qu’une seule fois les institutions pour la libération de tous les articles.

Note. Pour répondre à une question fréquemment posée, le RNBM, en tant qu’entité de l’Institut des sciences mathématiques du CNRS, ne peut pas faire ouvertement la publicité pour un service illégal comme Sci-Hub ou libgen. En revanche, étant donné l’usage massif de Sci-Hub|libgen à travers le monde et en particulier en France, il est normal que le RNBM en fasse état et en explique les mécanismes et les enjeux. Chaque mathématicien peut souhaiter avoir recours à un service comme Sci-Hub|libgen, parce que cela est efficace, parce que le savoir doit être diffusé, parce que ce type de subversion anarchiste pourrait forcer à terme les multinationales de l’édition mercantile à changer leur système.

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